LE XVIIIe siècle ressemble étrangement, par ses filous, au siècle que nous avons le malheur d’entamer. C’est pourquoi le XVIIIe siècle nous est si cher! A vrai dire, je crois même que de notre temps les voleurs pullulent et purulent plus excessivement; mais enfin, rendons grâce à un siècle qui va nous permettre de présenter un gaillard, alerte et résolu, qui sut «travailler» de façon à encore nous égayer, malgré tant et tant de bons «ouvriers» survenus depuis;—mémorable gloire de notre époque aussi peu sacrée que recommandable!
En Languedoc ou en Saintonge, l’annaliste Barbier (Journal de l’Avocat) ne précise pas plus expressément, vivait donc (nous sommes vers la fin du XVIIe siècle) un barbier-perruquier qui s’appelait tout court Perrin. On en fit Peirenc ou Peyrenc; et lui, pendant ce temps, il fit trois fils.
Ce n’était pas si mal opérer. Ou, du moins, le barbier-perruquier eût pu s’en tenir au premier de ses rejetons; car ce fut cet aîné qui, comme nous l’allons voir, assura le sort de toute la famille.
Quel prénom lui fut donné? Choix indifférent: Abraham,—aux environs de 1683, l’année de sa joyeuse naissance.
Le futur détrousseur poussa bien. Il se développa physiquement et moralement de manière à éblouir. C’était vraiment un lièvre de race. Aussi les compliments qu’on ne manquait point de lui offrir chaque jour l’étourdirent bientôt; alors, abandonnant sa petite ville nourricière, Abraham piqua droit sur Paris.
Arrivé, il prit le vent et il se mit à pratiquer le métier paternel. Il devint garçon-frater; et il courut par les rues pour poudrer l’un, pour coiffer l’autre.
Mais ce métier ne satisfit point ses goûts. Il se mit alors à chercher un plus louable emploi, comptant bien que sa mine accorte, son esprit et le reste lui procureraient, un prochain jour, une fort convenable situation.
A courir après la Fortune, on attrape, quelquefois, cette gueuse aveugle. Abraham tomba un jour, comme marée en carême, dans l’hôtel particulier d’un illustre tire-laine, qui cherchait justement un valet de chambre-barbier, bien fait, aimable et de propos spirituels.
Les deux hommes s’entendirent sur-le-champ. Il y a de ces touchants accords qui déroutent le plus précis pessimisme des plus amers misanthropes.
Le tire-laine s’appelait François-Marie Fargès. Il comptait parmi les plus riches et les plus honorables bourgeois de Paris. Sa vie offrait un exemple.
Ex-soldat, il était devenu, coup sur coup, munitionnaire des vivres, puis «conseiller-secrétaire du roi, maison et couronne de France et de ses finances!»—enfin «chevalier de l’ordre de Saint-Michel»!
«Il avait, dit, en l’enviant, un contemporain, le secret de ne pas payer un seul de ses créanciers.»
Noble figure!
Rodin à l'hotel de Biron et à Meudon (French Edition), Rodin a l’Hotel de Biron,Notes d’Album,Rodin a Meudon,Appendice, AUGUSTE RODIN
En Languedoc ou en Saintonge, l’annaliste Barbier (Journal de l’Avocat) ne précise pas plus expressément, vivait donc (nous sommes vers la fin du XVIIe siècle) un barbier-perruquier qui s’appelait tout court Perrin. On en fit Peirenc ou Peyrenc; et lui, pendant ce temps, il fit trois fils.
Ce n’était pas si mal opérer. Ou, du moins, le barbier-perruquier eût pu s’en tenir au premier de ses rejetons; car ce fut cet aîné qui, comme nous l’allons voir, assura le sort de toute la famille.
Quel prénom lui fut donné? Choix indifférent: Abraham,—aux environs de 1683, l’année de sa joyeuse naissance.
Le futur détrousseur poussa bien. Il se développa physiquement et moralement de manière à éblouir. C’était vraiment un lièvre de race. Aussi les compliments qu’on ne manquait point de lui offrir chaque jour l’étourdirent bientôt; alors, abandonnant sa petite ville nourricière, Abraham piqua droit sur Paris.
Arrivé, il prit le vent et il se mit à pratiquer le métier paternel. Il devint garçon-frater; et il courut par les rues pour poudrer l’un, pour coiffer l’autre.
Mais ce métier ne satisfit point ses goûts. Il se mit alors à chercher un plus louable emploi, comptant bien que sa mine accorte, son esprit et le reste lui procureraient, un prochain jour, une fort convenable situation.
A courir après la Fortune, on attrape, quelquefois, cette gueuse aveugle. Abraham tomba un jour, comme marée en carême, dans l’hôtel particulier d’un illustre tire-laine, qui cherchait justement un valet de chambre-barbier, bien fait, aimable et de propos spirituels.
Les deux hommes s’entendirent sur-le-champ. Il y a de ces touchants accords qui déroutent le plus précis pessimisme des plus amers misanthropes.
Le tire-laine s’appelait François-Marie Fargès. Il comptait parmi les plus riches et les plus honorables bourgeois de Paris. Sa vie offrait un exemple.
Ex-soldat, il était devenu, coup sur coup, munitionnaire des vivres, puis «conseiller-secrétaire du roi, maison et couronne de France et de ses finances!»—enfin «chevalier de l’ordre de Saint-Michel»!
«Il avait, dit, en l’enviant, un contemporain, le secret de ne pas payer un seul de ses créanciers.»
Noble figure!
Rodin à l'hotel de Biron et à Meudon (French Edition), Rodin a l’Hotel de Biron,Notes d’Album,Rodin a Meudon,Appendice, AUGUSTE RODIN